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Latortue provoque la colére à son passage à Montréal

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Issue: 24 Section: Français Geography: Quebec Montreal, Haiti

December 12, 2004

Latortue provoque la colére à son passage à Montréal

by Dru Oja Jay


Photo: Jean Saint Vil
«Latortue assassin, Paul Martin complice!» Tel était le mot d'ordre de choix des centaines de membres de la diaspora haïtienne (de Montréal, Ottawa, Toronto et des États-Unis) qui ont tenu une vigoureuse et bruyante manifestation devant le Centre Mont-Royal à Montréal samedi dernier.

C'était à l'occasion du passage à Montréal du premier ministre intérimaire de facto d'Haïti, Gérard Latortue, venu rencontrer le premier ministre Paul Martin et les ministres Pierre Pettigrew, Denis Paradis et Denis Coderre. Selon l'équipe Martin, le Canada «a un rôle très spécial à jouer» dans l'avenir d'Haïti. Les organisateurs de l'événement, annoncé comme une rencontre «avec la diaspora haïtienne», se sont contentés de reprendre la ligne actuelle du Parti libéral: que le Canada est en Haïti pour le long terme pour rassembler l'aide, former les juges et organiser les élections.

Pour les manifestants à l'extérieur, par contre, c'est la complicité du Canada dans ce que de nombreux observateurs appellent le renversement à l'instigation des États-Unis du gouvernement démocratiquement élu Jean-Bertrand Aristide qui a surtout été l'objet de l'attention. Le premier ministre Yvon Neptune et l'ancien président du Sénat Yvon Feuillé sont en prison. La plupart des autres membres du parti sont dans la clandestinité et beaucoup ont été assassinés. Par contraste, le premier ministre de facto Latortue affirme qu'«il n'y a pas de prisonniers politiques en Haïti», bien qu'il ait dit publiquement qu'il verrait à mettre l'ancien président Aristide en état d'arrestation.

«Le gouvernement du Canada a invité toutes les autorités illégales [...] qu'ils ont installées au pouvoir pour s'entretenir avec elles de l'avenir d'Haïti sans la participation du peuple haïtien, dit Jean Saint-Vil, du Haitian Lawyer' Leadership Network. Ceux qui s'affichent en dirigeants d'Haïti sont tous des gens qui n'ont pas été élus et qui n'ont aucune légitimité.»

Les manifestants ont également noté que ce point de vue est partagé par des dizaines de pays africains et caribéens qui ont refusé de reconnaître le gouvernement Latortue. Aux États-Unis, les congressistes Maxine Waters, Dennis Kucinich, Barbara Lee et d'autres ont signé une déclaration qualifiant Latortue de marionnette des États-Unis.

Un des organisateurs de la conférence de Montréal semble bien capté la pensée des invités à l'intérieur lorsqu'il a dit: «Aristide est parti. C'est un fait et nous devons l'accepter.»

(Les reporters de Dominion ne sont toujours pas autorisés à assister à une conférence de presse du gouvernement fédéral.)

Passé colonial, présent colonial


Photo: Jean Saint Vil
Les organisateurs de la manifestation ont dénoncé l'approche consistant à envoyer de l'aide à Haïti comme façon de réparer les problèmes du pays, disant que c'est une insulte quand on sait la vraie misère humaine que vit Haïti en ce moment. La seule solution qui soit juste, disent-ils, n'est pas l'aide mais l'annulation de la dette accumulée par des dictateurs illégitimes soutenus par les États-Unis et la remise de l'argent carrément volé par les gouvernements de France et des États-Unis.

«Haïti est pauvre parce que nous n'avons jamais eu la chance d'investir dans nos infrastructures», dit Saint-Vil, citant l'exploitation du travail et des ressources d'Haïti pour enrichir les puissances étrangères mais pas les Haïtiens.

En 1825, la France a obligé Haïti à verser une «compensation» aux anciens propriétaires de plantations et maîtres d'esclaves, chassés du pays par le mouvement d'indépendance, en échange de l'accès aux marchés mondiaux. On a même dû fermer les écoles en Haïti pour faire le premier versement. Jean-Bertrand Aristide avait lancé une campagne internationale pour forcer la France à rembourser cet argent, qu'on estime maintenant à 22 milliards $. «Une des premières choses qu'a faites le gouvernement fantoche fut de déclarer que la France ne doit plus rien à Haïti», dit Saint-Vil.

François-Michelet Demas a souligné pour sa part que la richesse et la démocratie des pays comme la France et les États- Unis ont été construites avec l'argent volé aux colonies comme Haïti.

«Ce qu'il faut, dit Saint-Vil, ce n'est pas le geste hypocrite que Paul Martin s'affaire à promouvoir» mais «une réparation tangible et la restitution à Haïti de ce pour quoi nos ancêtres ont combattu, et notre argent. Les 150 millions de francs que la France a pris font partie de cette restitution.»

Au lieu de cela, explique-t-il, Latortue et Martin veulent endetter Haïti encore plus.


Photo: Daniel Sweeney
«La 'communauté internationale' a promosé de donner 2 milliards $ au gouvernement illégal de Latortue. On n'a pas précisé qu'au moins la moitié de cette somme sera sous forme de prêts, qu'Haïti devra rembourser. Ils prennent des décisions qui vont endetter Haïti pour des générations.»

Le point de vue du gouvernement canadien fait contraste à ses prétentions qu'Haïti est un «État échoué», que le Canada a «la responsabilité d'intervenir» et que les dirigeants haïtiens «baignent dans la corruption et l'incompétence depuis l'indépendance».

Besoin de solidarité, manque de presse

«Nous avons besoin de la solidarité des Canadiens et des Québécois, dit Jean-Laurent Nelson. Nous vivons tous sur la même planète, nous avons tous le même problème et il n'y a qu'une solution: la solidarité.»

Plusieurs organisateurs ont également souligné que les Canadiens et les Québécois doivent comprendre la situation du peuple haïtien et exercer des pressions sur leur gouvernement. Dans ce contexte, le sujet de la désinformation revient souvent sur le tapis.

«Les gens ne savent pas ce qui se passe parce que la presse le cache, dit Nelson. On trouve des milliers de cadavres à chaque jour en Haïti et la presse n'en parle pas.»

«Pour avoir la solidarité des gens au Canada, ils doivent être informés, d'ajouter Demas. Ils sont maintenus dans l'ignorance totale.» Il a accusé la presse de démoniser Aristide pour justifier son renversement et d'être maintenant complice du «pacte du silence».

Il a également noté la division raciale dans l'appui à Aristide. «Les pays avec des populations noires, en Afrique et dans les Caraïbes, soutiennent Aristide. La France et les États- Unis, avec leurs passés colonialistes et racistes, vont dans le sens contraire. Le Canada, qui n'a pas été une puissance coloniale, a malheureusement décidé de suivre ces deux derniers.»

La division raciale et le silence des médias ont été évidents tout au long de la journée. Des quelques centaines de manifestants, une poignée seulement avaient la peau blanche. Bien que 190 journalistes aient été invités à la conférence de presse, aucun des journalistes de la grande presse n'est venu, sauf un cameraman qui n'est resté que pour capter quelques images.

Magalee, qui a convoqué la conférence de presse, a accusé les journalistes de fermer les yeux pendant que des atrocités sont commises. «S'ils devaient venir et apprendre combien de gens meurent en Haïti en ce moment, ils diraient: 'Comment se fait-il que nous ne le savions pas?'» Elle a cité le cas du Rouanda, où «des massacres se produisent constamment mais nous n'en entendons parler qu'à la fin».

«Il pourrait y avoir un génocide en Haïti, des gens se font tuer. Un ancien soldat a tué une fillette de six ans et tout le monde sait qui il est, mais il n'a pas été arrêté.»

*Traduit de l'anglais par Le Marxiste-Léniniste.

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